Résultats des études et recherche

L’Observatoire d’Intérêt Scientifique Ornithologique développe des programmes d’études et recherches qui visent à une meilleure connaissance pour la conservation des espèces et des habitats menacés, en lien avec les structures gestionnaires et responsables. Ci-dessous nous présentons les résultats déjà obtenu sur quelques programmes.
  •          Fonctions et gestion des roselières     voir ci dessous
  •          Habitat et écologie des espèces           voir ou plus bas ci-dessous
  •         Phénologie et suivi des migrations      voir ou plus bas ci-dessous
  •         Evaluation des méthodes                       voir ou plus bas ci-dessous
  •     Structure démographique de l’avifaune nicheuse voir ou plus bas ci-dessous

Thème : Fonctions et gestion des roselières
Les roselières des zones humides de la côte atlantique accueillent chaque année des millions d'oiseaux en halte migratoire. La plupart sont humides toute l'année et influencées par les marées, mais certaines, moins bien connues, sont asséchées en été. Quelles sont les différences d'accueil des espèces, en particuliers migratrices et insectivores, leurs différences d'abondance, de diversités, de durée de séjour et de structure dans l'habitat roselière ? Dans la zone estuarienne de l'Adour, deux sites en phragmitaie similaire ont été comparé selon un protocole identique de capture-baguage au filet en août et septembre pour deux années différentes. Les relevés habitat ont porté principalement sur les paramètres des roseaux: hauteur, diamètre, densité, stratification. Les résultats montrent que la roselière humide est plus diversifiée et accueille un plus grand nombre d'individus pour les espèces paludicoles et les migrateurs transsahariens. Les roseaux y sont plus hauts, plus épais, moins denses et présentent une strate herbacée plus faible. La roselière sèche présente un intérêt pour des espèces tolérant des conditions hydriques plus faibles comme la Locustelle tachetée et le Phragmite aquatique, pour lesquels la roselière inondée mâture n'est pas un habitat préférentiel. Afin de réguler la progression des ligneux ou des espèces envahissantes exogènes (Erable negundo, Baccharis…) et d'accueillir plus de migrateurs transsahariens, il est proposé de maintenir une lame d'eau constante dans ces roselières actuellement asséchées en été.
Pour en savoir plus: Fontanilles P., Brongo M., De La Hera Fernandez I., Fourcade J.M., Keller A.,  Lapios J.M. & Sourdrille K. 2017. Les roselières inondées accueillent-elles plus de passereaux migrateurs que les roselières sèches ? Structure de l’habitat et avifaune sont comparées. Alauda, 85(3): 161-178.  PDF

 Roselière inondée d'Urdains                                                                 Roselière asséchée l'été de Quartier-bas 




                                                                   











Les passereaux utilisent les champs de maïs en complément des roselières en automne : abondance, régime et ressources alimentaires dans une zone humide anthropisée.

Les habitats des zones humides ont connu une réduction et une fragmentation dramatique de la biodiversité, en raison des activités humaines telles que l'urbanisation et l'agriculture. Aujourd'hui, les oiseaux, en tant qu'indicateurs de cette biodiversité, doivent de se reproduire, hiverner ou faire une halte migratoire dans ces zones humides fortement altérées.  Ils doivent concentrer leurs activités dans des habitats reliques (cas ici des roselières humides), des habitats suboptimaux (roselière sèche) ou dans leur environnement tels que les champs agricoles (maïs).

Dans une vaste zone humide située au sud-ouest de la France (400 ha, Barthes de la Nive, 64, Fig. 1) sur une voie importante de migration nous avons testé si l'abondance des espèces de passereaux diffère d'un habitat à l'autre en fonction de leur spécialisation et de leur écologie (roselière humide vs roselière sèche ou maïs ; espèces aquatiques vs généralistes ; migrateurs vs locaux). Nous voulions identifier les mécanismes sous-jacents des variations observées en examinant : la disponibilité des arthropodes dans chaque habitat, le régime alimentaire de cinq espèces d'oiseaux insectivores et la capacité d’engraissement des oiseaux. Nous avons mis en place un protocole standard de capture entre sites en 2015 et 2016 (Fig. 1 et 2).

Les cultures de maïs ont accueilli plus d'invertébrés et de biomasse que les roselières pour les coléoptères, les diptères, les aranéides et les cicadellidés. Cela peut expliquer pourquoi ces cultures ont été utilisées par une large diversité de passereaux :  aquatiques (Gorgebleue à miroir, Phragmite des joncs, Rousserolle effarvatte), migrateurs non aquatiques (Pouillot fitis, Rossignol philomèle) ou des généralistes locaux (Rouge-gorge, Mésange bleue, Mésange charbonnière, Fig.3). Le régime alimentaire de la Gorgebleue, espèce aquatique généraliste, était composé principalement de Formicidae qu’elle a trouvé aussi bien dans chaque habitat.

Malgré la disponibilité de nourriture dans les champs de maïs, les oiseaux spécialistes, résidents ou migrateurs, ont été plus abondants dans les roselières : la Bouscarle de Cetti se nourrissant principalement d'Araneidae et de Cicadellidae ; la Rousserolle effarvatte de pucerons et coléoptères.

Les roselières sèches ont été mieux utilisées par la Locustelle tachetée qui se nourrit de Formicidae. Phragmite des joncs et Rousserolle effarvatte étaient plus abondantes dans les roselières humides (Fig.3). Cependant pour cette dernière espèce, nous avons constaté que les jeunes s engraissaient aussi dans les champs de maïs.

Par conséquent, la stratégie d'utilisation des cultures de maïs est différente selon la spécialité et le statut des espèces. Les résidentes généralistes peuvent s’y déplacer en continuité de la végétation et/ou y rechercher de la nourriture. Les migrateurs ayant besoin de se ravitailler peuvent aussi la fréquenter mais les transsahariens aquatiques restent plus spécialistes de la roselière. La culture de maïs offre des ressources alimentaires et des abris appropriés pour certaines d'espèces. Elle peut être un habitat complémentaire dans l’environnement proche des roselières humides et sèches, mais pas un substitut. Notre étude confirme la nécessité de conserver et d’étendre les roselières menacées de fermeture et d’assèchement.

Plus d’informations : Fontanilles Ph., Fourcade J.M., De Hera I., Kerbiriou C. 2024. Passerines use of maize crop in addition to reedbed in autumn: abundance, diet and food availability in anthropogenic wetland. Wetland Ecology and Management. 

Figure 1 Zone d’étude des Barthes de la Nive (64) avec les 4 sites de captures et la carte de végétation.


Figure 2 Filet de capture en champ de maïs